C-Brain, art japonais et luxe horloger
adscite a rencontré Yukiyo Hashimoto, de C-Brain, entre les allées du salon Maison&Objet. Plus précisément, dans l’espace Beloved où les objets utiles côtoient les plus futiles. C’est aussi lors de cette même édition que le créateur Ivan Duval a raconté à la rédaction l’histoire du studio Atypyk.
Entre les produits originaux du danois Livingly, manufacturés depuis 1952, et La Petite Papeterie Française de Sylvie Bétard. Entre les lunettes de soleil Kapten & Son et les objets édités chez Leçon. Une marque de montres japonaises luxueuses, C-Brain, présentait ses bijoux d’artisanat.
Les montres C-Brain sont assez récentes en Europe, pourtant la marque n’est pas nouvelle. Pouvez-vous nous parler des ateliers au Japon ?
Notre manufacture existe depuis vingt-deux ans à Kanazawa, dans la préfecture d’Ishikawa, une ville d’arts et d’histoire, qui ressemble à une sorte de petit Kyoto. Dans l’atelier, huit personnes travaillent. Leur formation n’est pas le fruit d’une tradition artisanale, du moins pas uniquement. Nos artisans viennent des Beaux-Arts ou de cursus universitaires artistiques. Ils ont tous des approches ouvertes et des techniques précises en accord avec la tradition. Ils sont surtout passionnés par un métier qui requiert à chaque instant concentration et dextérité afin d’obtenir un résultat combinant plusieurs pans de l’art japonais dans un simple objet du quotidien, qui devient ainsi précieux.
Kanazawa est une ville connue pour ses feuilles d’or, vous en utilisez chez C-Brain, mais usez-vous d’autres héritages artisanaux japonais ?
À Kanazawa, le travail de la feuille d’or est une spécialité. On y martèle l’or brut pour l’affiner depuis le XVIe siècle. Aujourd’hui, plus de 90% des feuilles d’or produites au japon viennent de Kanazawa. Nous en utilisons pour certains de nos cadrans, ainsi que des feuilles d’argent. Pour les autres héritages, je vais commencer par la technique de peinture que nous utilisons, celle du nihonga, vieille de mille quatre-cents ans. Pour l’expliquer simplement, le nihonga est une peinture à l’eau dont les couleurs sont obtenues par des pigments naturels, et tous les outils consacrés à cet art sont, eux aussi, entièrement naturels.
Nos pigments sont élaborés à partir de minéraux, c’est la tradition de l’iwaenogu. Dans les ateliers C-Brain, nous utilisons par exemple l’améthyste pour des nuances violetées, l’azurite pour du bleu, la malachite pour des notes vert-de-gris lumineuses. Les minéraux naturels sont d’une grande richesse, les teintes bleues, elles seules, comptent plusieurs nuances distinctes. Le Kon est bleu marine, le Gunjyo est lui ultramarine, le Gunryoku tire vers le bleu-vert, le Ruri ressemble au lapis lazuli et le Kamenozoki est bleu ciel. Et il existe encore d’autres types de pigments bleus, et bien d’autres couleurs.
Pour décorer certains de nos cadrans, nous utilisons aussi le washi. Un papier japonais extrêmement fin et d’une rare solidité. Pour nos montres, nous avons sélectionné un papier parmi les plus minces. Nos artisans font preuve d’une grande minutie pour appliquer les motifs et découpes de washi dans la montre, sans stopper le mécanisme d’horlogerie.
Des mécanismes d’horlogerie confectionnés dans vos ateliers ?
Non, nous n’avons pas de métier purement horloger à la manufacture. Nous utilisons un mécanisme d’horlogerie japonaise Seiko. Le mécanisme est la seule pièce apportée de l’extérieur, tout le reste est fait à la main dans nos ateliers, de la peinture jusqu’à la pose des aiguilles.
Quelle est la clientèle de C-Brain ?
Nous avions initialement bien plus de clientes que de clients, mais depuis quelques années la tendance s’équilibre peu à peu. Il est vrai que nos choix de couleurs restent très purs. Peut-être que dans l’imaginaire collectif ces couleurs sont plus féminines. Pour les hommes, nous avons une gamme de boitiers unisexe, qui peuvent s’assembler avec des bracelets plus larges, aux tons plus masculins. Nous accordons une grande importance aux bracelets, pour la qualité du cuir choisi, mais aussi pour la diversité des teintes proposées. Quand un client achète une montre C-Brain, il achète en premier le cadran et ensuite plusieurs bracelets en cuir peuvent s’accorder. Les combinaisons, les personnalisations sont au gré des envies.
Cependant, tous nos modèles ne peuvent pas être déclinés pour les hommes. Les méthodes et design traditionnels vivent grâce à leurs contraintes qui en font des pièces d’exception. Ainsi, nos montres avec des motifs en papier washi ne se déclinent pas en plus grande taille pour des raisons techniques.
Alexandre Fisselier